Ecrit sous la direction de Maître Anne MACCHIA, Avocat à VALENCIENNES, le 17 juillet 2023
Qu’est-ce que la garantie de parfait achèvement ?
La garantie de parfait achèvement est prévue à l’article 1792-6 du Code Civil qui dispose que :
« […] La garantie de parfait achèvement, à laquelle l'entrepreneur est tenu pendant un délai d'un an, à compter de la réception, s'étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l'ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux révélés postérieurement à la réception.
Les délais nécessaires à l'exécution des travaux de réparation sont fixés d'un commun accord par le maître de l'ouvrage et l'entrepreneur concerné.
En l'absence d'un tel accord ou en cas d'inexécution dans le délai fixé, les travaux peuvent, après mise en demeure restée infructueuse, être exécutés aux frais et risques de l'entrepreneur défaillant.
L'exécution des travaux exigés au titre de la garantie de parfait achèvement est constatée d'un commun accord, ou, à défaut, judiciairement.
La garantie ne s'étend pas aux travaux nécessaires pour remédier aux effets de l'usure normale ou de l'usage. »
A la différence des autres garanties légales que sont la garantie décennale et la garantie biennale de bon fonctionnement, ayant pour objet toutes deux l’indemnisation du préjudice subi par le maître d’ouvrage, la garantie de parfait achèvement est une obligation en nature, celle de reprendre les désordres affectant les travaux afin de rendre l’ouvrage conforme à ce qui a été convenu au sein du contrat de construction.
La garantie de parfait achèvement est une obligation d’ordre public, ce qui signifie qu’est réputée non-écrite toute clause d’un contrat tendant à exclure la garantie de parfait achèvement ou à en limiter la portée, et ce conformément à l’article 1792-5 du Code Civil, modifié par la loi n°90-1129 en date du 19 décembre 1990, qui dispose que :
« Toute clause d'un contrat qui a pour objet, soit d'exclure ou de limiter la responsabilité prévue aux articles 1792, 1792-1 et 1792-2, soit d'exclure les garanties prévues aux articles 1792-3 et 1792-6 ou d'en limiter la portée, soit d'écarter ou de limiter la solidarité prévue à l'article 1792-4, est réputée non écrite. »
Quels désordres sont concernés par la garantie de parfait achèvement ?
Comme le précise l’alinéa 2 de l’article 1792-6 du Code Civil, la garantie de parfait achèvement concerne « […] la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l'ouvrage ».
Cette formulation vise donc tous les désordres quels que soient leur origine, leur nature, leur importance, leur finalité ou leur caractère apparent ou caché.
Il peut donc s’agir de désordres graves ou simplement esthétiques, de défauts de conformité, de vices affectant l’ouvrage, de gros œuvre ou de travaux de finition, de désordres rendant l’ouvrage impropre à sa destination, etc…
Peu importe également le moment de la survenance des désordres, la garantie de parfait achèvement couvrant tant les désordres apparus avant la réception et faisant l’objet de réserves, que ceux apparus dans l’année suivant la réception et qui ont fait l’objet d’une dénonciation écrite.
L’alinéa 6 de l’article 1792-6 du Code Civil exclut toutefois de cette notion de globalité les « […] travaux nécessaires pour remédier aux effets de l'usure normale ou de l'usage. »
Ne sont également pas couverts par la garantie de parfait achèvement les désordres qui étaient apparents au moment de la réception et qui n’ont pas fait l’objet d’une réserve, l’absence de réserve ayant pour effet de purger l’ouvrage des désordres apparents, le maître de l’ouvrage étant alors réputé avoir renoncé à s’en prévaloir.
Conditions et délais de mise en œuvre de la garantie de parfait achèvement
De manière générale, la mise en œuvre de la garantie de parfait achèvement suppose que la réception soit intervenue.
Deux cas de figure se présentent alors : soit les désordres sont apparus avant la réception et ceux-ci doivent donc faire l’objet de réserves lors de la réception, soit les désordres sont apparus postérieurement à la réception de l’ouvrage et ils doivent donc faire l’objet d’une notification écrite, comme prévu par l’article 1792-6 du Code Civil.
Dans l’hypothèse où les désordres apparaissent postérieurement à la réception de l’ouvrage, bien que le texte prévoit que ces désordres doivent faire l’objet d’une notification écrite, il n’en précise cependant pas les modalités.
Il est toutefois préférable de procéder par voie de notification par courrier recommandé avec avis de réception afin de pouvoir, le cas échéant, justifier du respect du délai imposé par le texte.
Une fois les désordres dénoncés soit dans le procès-verbal de réception soit par voie de dénonciation écrite postérieure à la réception, l’entrepreneur est tenu d’effectuer les travaux de reprise dans les délais fixés d’un commun accord entre le maître d’ouvrage et l’entrepreneur.
S’agissant du délai d’un an durant lequel l’entrepreneur est tenu par la garantie de parfait achèvement, l’alinéa 2 de l’article 1792-6 ne précise pas plus avant s’il s’agit du délai imparti au maître de l’ouvrage pour effectuer la dénonciation écrite des désordres survenus postérieurement à la réception, ou s’il s’agit du délai qui lui est imparti pour introduire une action en justice dans le cas où l’entrepreneur n’aurait pas remédié aux désordres dans le délai convenu entre les parties.
C’est la Cour de cassation qui, par l’interprétation qu’elle a faite du texte, précise que ce délai s’entend tant pour la dénonciation des désordres postérieurs à la réception que pour l’introduction de l’action en justice. (Cass. 3è civ., 18 déc. 2001, n°00-15.481) https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007427421
La réception de la notification écrite des désordres valant mise en demeure de reprendre certains désordres n’a donc pas d’effet interruptif et l’assignation en justice, au fond ou en référé, doit elle-même intervenir dans le délai d’un an de la réception.
Toute action en justice au titre de la garantie de parfait achèvement intervenant plus d’un an après le procès-verbal de réception est donc irrecevable.
Il appartient donc au maître d’ouvrage d’assigner en justice l’entrepreneur au titre de la garantie de parfait achèvement, au cours de l’année suivant la réception de l’ouvrage afin d’interrompre le délai de forclusion.
Dans le cas d’une assignation en référé tendant à obtenir la désignation d’un expert judiciaire, l’ordonnance de référé organisant une mesure d’expertise aura pour effet d’ouvrir un nouveau délai d’un an. Si les opérations d’expertise venaient à durer dans le temps, il appartiendrait alors au maître d’ouvrage d’assigner au fond dans le délai d’un an de l’ordonnance de référé, toujours afin de sauvegarder ses intérêts et interrompre le délai annal.
Article rédigé sous la direction de Maître Anne MACCHIA, Avocat à VALENCIENNES
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